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Homélie sur le Psaume 136
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Archiprêtre Léonide Grilikhès
« Au bord des fleuves de Babylone » : Homélie sur le Psaume 136. L’une des particularités liturgiques des semaines préparatoires au Grand carême (ces semaines que nous vivons actuellement), est le chant du Psaume 136. Ce psaume : « Au bord des fleuves de Babylone » se chante seulement trois fois par an, aux vigiles des trois dimanches qui précèdent le Grand carême. Le Psautier, comme on le sait, comporte 150 psaumes, dont une grande partie est l’œuvre du roi David qui vivait dans la première moitié du Xe siècle avant Jésus-Christ. Mais David n’est pas seulement l’auteur de psaumes, on peut dire qu’il a été le fondateur et l’inspirateur d’un certain genre de poésie religieuse. Et toutes les époques ultérieures ont continué de composer des chants dans lesquels l’homme se tourne vers Dieu pour Lui adresser les paroles de sa prière. Les psaumes les plus tardifs, qui font partie du canon tel qu’il a été fixé définitivement, sont datés du IIIe ou peut-être même du IIe siècle avant Jésus-Christ. Ainsi le Psautier comme livre a près de huit siècles d’histoire et on ne peut pas toujours dire avec certitude à quelle époque tel ou tel psaume a été composé. Mais le Psaume 136, lui, est assez précisément daté. Il remonte à la période de la captivité de Babylone. En 586 avant le Christ, Nabuchodonosor roi de Babylone a détruit le temple de Jérusalem, le principal lieu saint, et avec lui toute la ville, et il a emmené les habitants de la Judée en captivité, d’où ils ont pu revenir après plus d’un demi-siècle, sous un autre souverain : Cyrus roi des Perses. Nous pouvons donc dire que le psaume « Au bord des fleuves de Babylone » a été écrit au milieu du VIe siècle avant le Christ et exprime la nostalgie des hébreux captifs pour leur chère ville de Jérusalem. À l’époque chrétienne, et surtout avec l’essor du monachisme au IVe siècle, le Psautier devient le livre avec lequel s’accomplit la prière constante, pratiquée par les ermites et les moines ascètes qui se sont consacrés à Dieu. Les psaumes deviennent l’instrument du combat spirituel et beaucoup d’événements historiques et réels représentés dans les psaumes sont interprétés d’une manière spirituelle. Par exemple : Jérusalem est comprise comme la patrie céleste et Babylone comme le péché. Désormais la captivité de Babylone n’est plus seulement l’indication d’un certain fait historique, mais l’image d’un estrangement par rapport à Dieu, d’un sentiment d’abandon de Dieu, et ce sentiment est le fruit du péché. On pourrait dire que c’est l’image de notre monde, captif du péché. « Babylone » devient le symbole de notre réalité, du monde déchu, c’est-à-dire qui est tombé loin de Dieu. Telle est bien la réalité : le monde s’est éloigné de Dieu. Mais quelle est notre attitude face à cette réalité ? La question est très importante. Prenons-nous cette réalité comme la seule possible ? Sommes-nous satisfaits de ce que nous avons, ou gardons-nous la mémoire de notre patrie céleste ? Il est facile de dire : oui, ce monde, cette vie, c’est la seule chose que j’ai et donc tous mes projets, tous mes espoirs, toutes mes joies, je les relie seulement à cela. (Et au fait, nombreux furent les juifs qui ne voulurent pas revenir de captivité quand la possibilité s’en présenta). « Comment chanterai-je un cantique au Seigneur en terre étrangère ? » dit le Psalmiste, qui nous rappelle aujourd’hui que celui qui a éprouvé, ne serait-ce qu’une seule fois, une vraie joie spirituelle, ne peut se contenter de rien de terrestre. « Si je t’oublie, Jérusalem, que ma droite se dessèche ». La droite, c’est-à-dire la main forte, c’est l’image de la force. Que mes forces me quittent, dit le Psalmiste, que je sois faible, que je ne sois plus bon à rien si j’oublie Jérusalem, si je perds la mémoire du lieu où se trouvait le temple de Dieu, du lieu où demeurait la gloire de Dieu. « Que ma langue s’attache à mon palais si je ne fais pas Jérusalem la première de mes joies ». C’est-à-dire, que je devienne muet, que je sois privé de la possibilité de chanter et de parler, plutôt que de me permettre de substituer des joies terrestres à la joie spirituelle (la joie de la liturgie, de la communion avec Dieu, qui pour les Hébreux étaient liées au temple de Jérusalem). Le Grand carême s’achève par la fête de l’Entrée du Seigneur à Jérusalem. Le grand carême, c’est une tentative de nous élever au-dessus de notre vie quotidienne. C’est une tentative d’abandonner la captivité et de commencer à progresser vers Jérusalem. Et si en 40 jours nous pouvons nous rapprocher de notre patrie spirituelle, alors à la fin du Grand carême, comme les habitants de Jérusalem, nous pourrons sortir avec des rameaux à la main, pour aller à la rencontre de Notre Seigneur. Date de création : 20/02/2018 @ 22:48
Dernière modification : 23/02/2018 @ 08:27
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